Éditorial: Convaincre de l’efficience sociale de l’assurance

L’assurance étant d’abord un système de protection financière volontaire, le grand objectif de la corporation est de convaincre une société culturellement mal préparée.

Pour ce faire, il importe d’abord de tenir la promesse de réparation financière dans des délais raisonnables. Dans ce sens les assureurs sont mis à l’épreuve sur un vaste programme de redressement qualitatif de la branche automobile, branche déterminante de la réputation de la profession. L’ampleur du retard dans la gestion des indemnisations est tel que des résultats positifs ne manqueront pas de se manifester dès les premiers progrès organisationnels…

Cependant pour réellement assumer sa raison sociale de protection de la population et de ses biens, la profession doit aussi convaincre dans son rôle de conseiller incitatif à la prévention et à la réduction des risques.

En la matière, elle n’a malheureusement pas de quoi pavoiser : le nombre de sinistres de toute sorte augmente de façon inquiétante pendant que les besoins insatisfaits de couverture de la population deviennent insoutenables. Ainsi elle est interpellée par l’ampleur des accidents automobiles avec cette statistique record de 4000 morts par an, statistique aiguisée par le récent drame de la corniche algéroise.

Fortement sollicitée lors du séisme du 21 mai dont les dégâts ont été jugés particulièrement excessifs par rapport à l’intensité de la secousse tellurique, la profession a joué un rôle relativement modeste.

Elle a aussi été interpellée dans son double rôle de protection financière et de promotion de la prévention lors de chacun des nombreux autres grands sinistres de l’année :
crashs aériens, accidents de pollutions marines etc. Les réponses, diverses en termes de couverture, sont restées timides en matière prévention et de réduction des risques.

Elle n’a pas de quoi pavoiser non plus face aux énormes besoins de protection des salariés restés sans réponse : besoins en assurance complémentaire maladie et en retraite complémentaire. Les inquiétudes de tous les salariés face à la précarité qu’induit la maladie et la retraite, ne trouve aucune offre palliative en raison de rigidités administratives…

Dans ce domaine, l’instrument de l’assurance économique peut apporter beaucoup pour rasséréner la condition de salarié si ce n’était la conjugaison des deux facteurs de frein que sont :
notre manque de dynamisme et la persistance de perceptions réductrices dans le monde du travail et dans le culte. Là aussi la profession est condamnée à convaincre pour progresser.

Paradoxalement, le secteur a réalisé une forte croissance de son portefeuille en 2002 (33%). L’explication tient pour beaucoup aux réajustements des taux de prime des affaires cédées en facultatif sur le marché international, réajustements faisant suite aux fameux évènements du 11 septembre 2001. La croissance n’ayant porté que sur la part des réassureurs, la profitabilité globale du secteur a stagné voire légèrement baissé en raison de la dégradation continue du portefeuille automobile. Sur cette base deux autres paradoxes peuvent être identifiés.

Premièrement, le poids de la réassurance augmente suite au réajustement des tarifs sur le marché international et à la persistance des pratiques de sous-tarification des risques non-réassurés. Cette tendance rend compte de la difficulté des assureurs à s’ajuster aux risques pendant qu’ils parviennent aisément à transmettre les ajustements du marché international. Il y a là certainement des gros efforts à déployer pour convaincre la clientèle acquise.

Deuxièmement, en 2003 face au séisme du 21 mai, les pertes des compagnies auraient pu être plus lourdes voire fatales si ce n’était la faible extension de l’assurance qui les a ainsi épargnées. En effet, les pertes résultant du séisme auraient englouti plusieurs fois le secteur. En fait, si tout sinistre en assurance présuppose le cumul préalable des primes et des cotisations correspondant, les risques de catastrophe naturelle sont et restent à ce jour non assurables sans dispositif particulier pour au moins étaler la charge des sinistres dans le temps.

Avec le soutien de l’Etat qui vient de rendre obligatoire cette assurance et d’offrir sa garantie, le secteur connaîtra un réel redéploiement de son portefeuille tant auprès des ménages que des entreprises. Grâce à ce dispositif, on peut escompter doubler à terme le volume de la production du secteur.

Cependant, ce soutien de l’Etat qui résulte d’une démarche de rationalisation de la gestion des deniers publics, risque, si les professionnels n’y prêtent pas attention, d’entretenir cette mauvaise image de l’assureur percepteur d’impôts…

Là encore, il y a de gros efforts à déployer pour convaincre.

Ainsi, à différents niveaux, la profession doit convaincre de son efficience sociale pour légitimer et garantir ses résultats financiers à long terme. Pour ce faire, elle doit obtenir des résultats suffisants en matière de promotion de la prévoyance, de la prévention et de la réduction des risques.

MESSAOUDI Abdelmadjid

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