Conformité : de la règle à l’acte
Le secteur financier algérien poursuit sa modernisation à un rythme soutenu, sous l’impulsion de réformes ambitieuses et d’une volonté affirmée d’alignement avec les standards internationaux. Dans ce contexte, la conformité s’impose progressivement comme un pilier structurant, au croisement des exigences réglementaires, de la gestion des risques et de la performance durable. Le secteur des assurances, pleinement intégré à cette dynamique, amorce une évolution profonde : celle du passage d’une conformité réglementaire formelle à une véritable culture de conformité, active, partagée et pérenne.
Les avancées enregistrées dans le domaine de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB/FT), impulsées par la Commission de Supervision des Assurances (CSA), ont permis la consolidation d’un cadre juridique à la fois exigeant et évolutif, fondé sur les principes de cohérence, de progressivité et d’adaptation aux spécificités du secteur. Néanmoins, au-delà de la solidité du dispositif normatif, son efficacité réelle repose sur sa capacité à être pleinement intégré aux structures existantes, à irriguer les pratiques professionnelles et à s’ancrer durablement dans les processus opérationnels. C’est dans cette perspective d’appropriation progressive et de déclinaison concrète qu’est inscrite l’élaboration d’un ensemble de Règlements et de Lignes directrices clairs et structurants, pensés comme des outils d’orientation, de clarification et d’accompagnement pour garantir une mise en œuvre harmonisée, pragmatique et conforme aux objectifs initiaux.
Longtemps considéré comme un secteur faiblement exposé aux risques LCB/FT, le marché des assurances évolue, aujourd’hui, dans un environnement en profonde mutation. L’essor du numérique, l’émergence de nouveaux canaux de distribution, ainsi que l’évolution des comportements assurantiels complexifient les risques et appellent à une vigilance accrue. Dans ce nouveau contexte, la conformité dépasse le cadre strictement réglementaire pour devenir un vecteur de gouvernance, de confiance et de crédibilité.
Au cœur de cette transformation, la connaissance-client (démarche dite KYC) s’impose comme une exigence stratégique. Elle mobilise des outils technologiques avancés, mais requiert également une appropriation transversale par l’ensemble des fonctions de l’entreprise. Plus qu’un simple processus, il s’agit d’un changement de posture qui engage les acteurs à revoir leurs pratiques et à inscrire la conformité dans leur fonctionnement quotidien.
Par ailleurs, les évolutions du contexte international —tensions géopolitiques, volatilité économique, exigences de transparence renforcées— imposent aux institutions financières des capacités d’adaptation continues. Certaines compagnies d’assurances prennent, dès à présent, la mesure de ces enjeux en investissant dans la formation, en structurant des dispositifs d’intelligence économique et en intégrant l’analyse prospective dans leur pilotage stratégique.
Ces efforts traduisent une ambition partagée : inscrire la conformité dans une démarche de long terme, à la fois comme levier de maîtrise des risques, facteur de résilience et condition essentielle de compétitivité. Le développement d’une culture de conformité commune, fondée sur la rigueur, la transparence et l’intelligence collective, constitue un objectif stratégique pour l’ensemble des parties prenantes du secteur.
Il ne s’agit plus seulement de répondre à une obligation réglementaire, mais surtout d’ancrer la conformité comme une composante essentielle de la gouvernance et du développement durable
La transformation engagée repose sur l’appropriation de nouveaux réflexes, sur la mobilisation de l’ensemble des acteurs du secteur, et sur un renforcement continu des capacités organisationnelles. En définitive, la conformité s’impose, désormais, non plus comme une fin en soi, mais comme une condition nécessaire à la consolidation d’un secteur des assurances robuste, crédible et résolument tourné vers l’avenir.
Par Abdelhakim Benbouabdellah
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Secrétaire du CNA