L’assurance de la responsabilité civile professionnelle « Produits Livrés »

L’assurance de la responsabilité civile professionnelle « Produits Livrés »

Tout produit[1] destiné à la consommation et/ou à l’usage, doit être conforme aux normes de sécurité, de salubrité et d’hygiène requises avant de le mettre sur le marché[2]. Lorsqu’un produit cause des dommages[3] au(x) consommateur(s)[4], la personne à laquelle est imputé le fait générateur de ces dommages est réputée responsable et doit par conséquent, supporter les conséquences pécuniaires de cette responsabilité.

C’est pourquoi la loi, dans un souci de protéger le consommateur, oblige toute personne intervenant dans le processus de fabrication du produit (depuis sa conception jusqu’à sa livraison) de s’assurer contre ces risques en souscrivant une assurance dite «Responsabilité civile produits».

  1. Références légales de l’obligation d’assurance
  2. Qui est assujetti à l’obligation d’assurance ?
  3. Quels sont  les produits visés par cette obligation d’assurance ?
  4. Quel est l’objet de cette assurance obligatoire ?
  5. Qu’en est-il en cas de responsabilité partagée ?
  6. Quelles sont les sanctions prévues en cas de défaut d’assurance ?
  7. Autres références législatives traitant du même thème (la loi 09-03)
1. Références légales de l’obligation d’assurance :

Ordonnance 95-07, relative aux assurances (modifiée et complétée).

Art. 168-Alinéa 1. Toute personne physique ou morale qui procède à la conception, fabrication, transformation, modification ou au conditionnement de produits destinés à la consommation ou à l’usage, est tenue de s’assurer pour sa responsabilité civile professionnelle vis-à-vis des consommateurs, des usagers et des tiers.

Décret exécutif n° 96-48 du 17 janvier 1996 fixant les conditions et modalités d’assurance en matière de ” responsabilité civile produits “. (J.O. n° 5 du 21 janvier 1996).

Article 1er. En application des dispositions de l’article 168 de l’ordonnance n° 95-07 du 25 janvier 1995 susvisée, le présent décret a pour objet de fixer les conditions et modalités d’assurance de responsabilité civile professionnelle vis à vis des consommateurs, des usagers et des tiers. Cette assurance est dite « Responsabilité civile produits ».

2. Qui est assujetti à l’obligation d’assurance ?

Sont assujetties à cette obligation, toutes personnes physiques ou morales (PME-PMI) intervenant  dans le domaine de la production de biens et qui procèdent à toutes ou l’une des activités suivantes ; 1-Conception, 2-Fabrication, 3-Transformation, 4-Modification, 5-Conditionnement, 6-Importation,  7-Distribution.

3. Quels sont les produits visés par cette obligation d’assurance ?

Ce sont les produits alimentaires, pharmaceutiques, cosmétiques, d’hygiène, industriels, mécaniques, électroniques, électriques et d’une manière générale, tout produit susceptible de causer des dommages aux consommateurs, aux usagers et aux tiers[5].

4. Quel est l’objet de cette assurance obligatoire ?

L’assurance “Responsabilité civile produits” a pour objet de garantir conformément à la législation en vigueur, les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile professionnelle de l’assuré[6] à raison des dommages corporels, matériels et pécuniaires causés aux consommateurs, aux usagers et aux tiers par les produits[7].  

Explication pratique :

Une personne ayant acheté un téléviseur et lors de son utilisation (dans le respect des normes et des consignes usuelles), cet appareil chauffe anormalement, puis prend feu et explose, provoquant des dommages matériels et corporels aux personnes présentes.

Après expertise des dégâts et la découverte du fait générateur de l’accident, toute victime de cet accident est en droit de se constituer partie civile et réclamer dommages et réparation de la part du/des responsable(s).

C’est à ce moment que l’assureur intervient pour prendre en charge le paiement du montant alloué par le juge.

5. Qu’en est-il en cas de responsabilité partagée ?

S’il s’avère (après expertise), que la responsabilité de l’accident est partagée entre plusieurs intervenants, (exemple ; le concepteur du transformateur, le fabriquant de la prise du courant…) chaque assureur (de ces intervenants) interviendra dans la proportion de la responsabilité qui incombe à son assuré.

Art 3. Décret exécutif 96-48.  En cas de responsabilité conjointe ou solidaire de l’assuré avec d’autres intervenants, la garantie d’assurance n’a d’effet qu’au prorata de la responsabilité de chaque intervenant dans le préjudice subi.

L’intervenant dans le domaine de la production est aussi tenu, en plus de l’obligation d’assurance, de prendre toutes les mesures appropriées et nécessaires pour la prévention des dommages et le sauvetage des produits[8].

6. Quelles sont les sanctions prévues en cas de défaut d’assurance ?

La personne se trouvant en infraction par rapport à l’obligation d’assurance (RC produit) est punie conformément à l’article 184 de l’ordonnance 95-07, d’une amende dont le montant varie entre 5.000 DA et 100.000 DA.

Cette amande est payée sans préjudice de la souscription de l’assurance en cause et des éventuelles poursuites judiciaires et des sanctions qui peuvent y être prononcées en raison des dommages que le responsable aura causé aux tiers.

Extraits du code pénal prononçant des sanctions applicables dans le domaine du produit alimentaire ou médicamenteux :

  • Lorsqu’une substance (alimentaire ou médicamenteuse) a causé, soit une maladie incurable, soit la perte de l’usage d’un organe, soit une infirmité permanente, les intervenants responsables sont punis de la réclusion à temps de dix (10) à vingt (20) ans et d’une amende de un million (1.000.000) de DA à deux millions (2.000.000) de DA.
  • Lorsqu’elle a causé le décès d’une personne, ils encourent la peine de réclusion criminelle à perpétuité[9].

7. Autres références législatives traitant du même thème (la loi 09-03) :

La loi 09-03 relative à la protection du consommateur et à la répression des fraudes est une véritable loi protectrice du consommateur/utilisateur et victimes des produits défectueux. Les dispositions de cette loi s’appliquent à tout bien ou service offert à la consommation (à titre onéreux ou gratuit), par tout intervenant et à tous les stades du processus de mise à la consommation.

Même si cette loi n’évoque pas de manière explicite l’obligation d’assurance RC produit, elle le fait néanmoins de manière indirecte, en citant l’ordonnance 95-07 relative aux assurances parmi ses visas.

Par ailleurs, cette loi instaure tant d’obligations assorties de sanctions, que les intervenants ont tout intérêt à prendre conscience de l’importance d’être bien assuré.

  • LES PRINCIPALES OBLIGATIONS INSTAUREES PAR CETTE LOI SONT LES SUIVANTES :
    • Obligation d’hygiène et de salubrité (articles 6 et 7) ;
    • Obligation de la sécurité des produits (article 9) ;
    • Obligation de contrôle de conformité du produit avant sa mise à la consommation (article 12);
    • Obligation de la garantie après vente et du service après vente (articles 13 & 16) ;
    • Obligation d’essai du produit (article 15) ;
    • Obligation d’information et d’étiquetage (respectivement les articles 17 & 18).
  • MOYENS PREVUS POUR LE RESPECT DE CES DISPOSITIONS, L’ON CITE :
    • La consécration des associations de protection des consommateurs (article 21) ;
    • La création d’un Conseil National de la protection des consommateurs (article 24) ;
    • L’autorité de contrôle : les officiers de police judiciaire, les agents autorisés par des textes spécifiques, les agents de la répression des fraudes, sont autorisés à procéder par tout moyen, à tout moment et à tous les stades du processus de mise à la consommation, aux contrôles de la conformité des produits (Article 25 & 29).
  • LES SANCTIONS PREVUES :
    • Les mesures répressives à prendre : la consignation et la saisie (articles 55 & 57) ;
    • Les sanctions (articles de 68 à 95).

1 – Produit : tout bien ou service susceptible de faire l’objet d’une cession à titre onéreux ou gratuit (article 3 – Loi n° 09-03 du 25 février 2009 relative à la protection du consommateur et à la répression des fraudes).

2 – Art 9 loi 09-03 – Dans les conditions normales d’utilisation ou dans d’autres conditions raisonnablement prévisibles par les intervenants, les produits mis à la consommation doivent être sûrs et présenter la sécurité qui en est légitimement attendue et ne pas porter atteinte à la santé, à la sécurité et aux intérêts du consommateur.

3 – Par dommage on entend ; dommages corporels, matériels et pécuniaires causés aux consommateurs, aux usagers et aux tiers (article 2 du décret exécutif 96-48)

4 – Consommateur : toute personne physique ou morale qui acquiert, à titre onéreux ou gratuit, un bien ou un service destiné à une utilisation finale, pour son besoin propre ou pour le besoin d’une autre personne ou d’un animal dont il a la charge (article 3 – Loi n° 09-03 du 25 février 2009 relative à la protection du consommateur et à la répression des fraudes).

5 – Article 168. Alinéa 2. Ordonnance 95-07.

6 – On entend par assuré ; le souscripteur de la police, personne physique ou morale. Dans le cas d’une personne morale, sont compris ; le président, les administrateurs, les directeurs, les gestionnaires, les gérants, les représentants légaux, les substitués dans la direction, les préposés, les stagiaires et les apprentis, dans le cadre de l’accomplissement de leurs obligations professionnelles auprès de l’assuré.

7 – Décret exécutif 96-48 Article. 2.

8 – Article 4 du décret exécutif 96-48 ; L’assuré est tenu de prendre les mesures appropriées de sauvetage des produits et de prévention des dommages, conformément à la législation et la réglementation en vigueur.

9 – Art. 432, Alinéa 2 & 3, code pénal (Modifié par la loi n° 06-23 du 20 décembre 2006)